Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 30 - 22 mai 2007
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 Archives de Forum

Un système d’étoiles doubles défie le modèle standard

La découverte a été faite grâce à une caméra infrarouge mise au point à l’Observatoire du Mont-Mégantic

René Doyon

S’il n’y a rien de nouveau sous le soleil, il y a du nouveau dans les étoiles. Une équipe de chercheurs du Département de physique a en effet repéré un système d’étoiles doubles dont les caractéristiques n’avaient jusqu’ici jamais été observées dans ce genre de formation.

Les étoiles doubles ne sont pas rares, mais la nouveauté est qu’il s’agit de deux naines brunes, ou naines rouges, très éloignées l’une de l’autre. Ces étoiles, situées dans la constellation du Phoenix, dans l’hémisphère Sud, ont une masse 10 fois moindre que celle du Soleil. Elles sont éloignées d’une distance de plus de 5000 fois la distance entre la Terre et le Soleil, soit environ 130 fois le rayon du système solaire en prenant Pluton comme limite.

«C’est une surprise!» déclare René Doyon, le professeur qui, avec son collègue Daniel Nadeau, a dirigé ces travaux réalisés par Étienne Artigau et David Lafrenière, deux étudiants au doctorat. «Les étoiles doubles sont normalement beaucoup plus massives et cela nous oblige à revoir le modèle de base de la formation de ces systèmes, dit-il. Il doit surement y en avoir d’autres de ce type.»

Selon les estimations des astrophysiciens, les deux étoiles mettent 500 000 ans à accomplir une rotation. Il est donc impossible d’observer directement ce mouvement. «Nous avons pu déterminer que c’est un système double parce que les deux étoiles se déplacent ensemble, ce qui montre qu’elles sont reliées par leur force gravitationnelle», indique René Doyon.

Rouges ou brunes?
Pour l’instant, le maintien de ce lien de gravité, qui est très faible, demeure un mystère puisqu’il se trouve d’autres étoiles dans le secteur. «Le système doit être très jeune, sinon les étoiles se seraient déjà séparées», estime le professeur.

Les étoiles se situent entre la catégorie des naines brunes et celle des naines rouges. Si ce sont des naines rouges, elles pourraient être âgées de un milliard d’années, donc être cinq fois plus jeunes que le Soleil, et avoir une masse plus importante que celle établie présentement. Leur formation pourrait persister pendant encore un million d’années.

Mais les deux astres sont à proximité d’un amas d’étoiles très jeunes et les chercheurs croient qu’ils pourraient faire partie de cet amas dont l’âge est de 30 millions d’années. Dans ce cas, il s’agirait de naines brunes dont la masse serait de moins de 100 fois celle de Jupiter, une masse trop faible pour assurer un lien gravitationnel de longue durée. Cette masse est également trop faible pour déclencher la transformation de l’hydrogène en hélium et les étoiles vont se refroidir et pâlir progressivement.

D’autres observations sont nécessaires pour déterminer plus précisément leur nature. L’équipe entend poursuivre ses travaux notamment en recherchant des traces de lithium dans l’atmosphère des étoiles, ce qui permettra de préciser leur masse et leur âge et ainsi de prédire leur évolution.

Ces travaux ont été réalisés en recourant à deux télescopes situés au Chili, soit celui de l’Observatoire interaméricain du Mont-Toluol et le télescope Gemini. Les chercheurs ont utilisé la caméra panoramique proche infrarouge (C-PAPIR) mise au point à l’Observatoire du Mont-Mégantic et qui possède un rayon d’action de l’ordre du diamètre apparent de la Lune, ce qui est le plus grand champ de balayage au monde pour ce type d’appareil.

Daniel Baril

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