Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 27 - 10 avril 2006
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

courrier du lecteur

Aimer son enfant ne suffit pas

Claude Halmos

J’ai assisté récemment à l’une de ces Belles Soirées qui nous invitent à aller plus loin après le travail vers toutes sortes de sujets.

La conférencière de ce soir-là, Claude Halmos, psychanalyste formée à l’école de Lacan et disciple de Françoise Dolto, était venue nous parler de sa réflexion sur la relation parents-enfants – dont elle a fait un livre: Pourquoi l’amour ne suffit pas? – à la lueur de sa longue expérience avec des enfants et des parents de tous les milieux.

La plupart des gens tiennent pour acquis que les parents aiment leurs enfants et que ceux-ci les aiment en retour. Or, Mme Halmos définit la relation d’amour entre parents et enfants comme très différente de la relation d’amour entre adultes. Pour elle, il n’est pas évident qu’on doive remettre à des parents un enfant qui leur a été retiré à la suite de comportements graves sous prétexte qu’ils disent aimer leur enfant.

Pour que l’amour ait un sens, il faut remplir un «devoir d’éducation», selon les mots de Françoise Dolto, c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas de tout donner et de tout permettre, mais de permettre à l’enfant de «se construire». Le tout-petit est dominé par le pulsionnel, le gout du plaisir, le sentiment de sa toute-puissance. Si l’on n’intervient pas, il peut devenir angoissé. Un enfant laissé sans limites peut s’en imposer lui-même et son intelligence ne se développe pas. De plus, il risque bien de ne pas être heureux.

«L’enfant n’est pas comme un petit chien qui devient un grand chien.» Chez lui, il faut l’intervention des parents pour qu’il apprenne au-delà de ce qu’il ressent, notamment il faut donner une explication à l’enfant et ne pas seulement dire: «Non, ça ne se fait pas.»

Plus tard, il faut autoriser le jeune à aller dans le domaine de son choix, même quand il dépasse le niveau d’études de ses parents. D’un autre côté, l’envie d’apprendre passe par le plaisir. Par exemple, si le parent n’aime pas la musique, il ne peut obliger son enfant à jouer d’un instrument. L’éducation à la loi humaine ne s’acquiert pas comme un catéchisme. «Je lui ai inculqué des valeurs», dira le parent, oui mais l’éducation passe aussi par des émotions. La conférencière a cité le cas d’un petit garçon qui était violent à la maternelle. Les parents en étaient très étonnés; or, en les interrogeant, on s’est aperçu qu’à la maison l’enfant s’amusait à martyriser le chat et qu’on le laissait faire…

Cela suppose écoute et exigence permanente de l’adulte à son enfant. Autre image qui éclaire les propos de Mme Halmos: le petit qui veut ouvrir le ventre du poisson rouge pour voir ce qu’il y a dedans montre des signes d’intelligence, mais la mère doit expliquer à son enfant que le poisson va mourir si on le coupe en deux et détourner le plaisir de l’enfant vers un autre but qui le satisfera autant. La dimension du plaisir est essentielle pour que l’enfant ne se sente pas entravé dans sa liberté.

C’est pour cette raison que les délinquants ne se retrouvent pas seulement dans les milieux défavorisés. S’ils ont contenu, enfants, leurs pulsions sans qu’elles aient été changées de but, elles reviendront. Cela peut expliquer les gestes violents ou insensés de certains adultes qu’on retrouve dans les faits divers.

L’exemple que la société donne à l’enfant est important aussi. Un enfant privé de tout éprouve un sentiment d’injustice de ne pas être comme les autres et il peut développer un sentiment de révolte. Il peut cependant comprendre qu’il ne peut tout avoir s’il reçoit quelque chose de temps en temps.

Beaucoup de parents aujourd’hui refusent de punir, mais c’est important de le faire. Se fâcher peut être sain pour les deux parties.

Le mot de la fin de Mme Halmos m’est resté en mémoire: on ne doit pas se culpabiliser ni se dire que le défi est trop exigeant, mais, si l’on voit un enfant qui a besoin d’aide, n’hésitons pas à lui tendre la main comme sait le faire un éducateur ou un professeur qui a pris conscience de l’importance de ce geste.

Merci à Nicole Cardinal, coordonnatrice des Belles Soirées, et à sa collègue, Armelle Wolff, de m’avoir donné l’occasion de rencontrer une femme d’expérience!

Brigitte Daversin
Technicienne en coordination de travail de bureau

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