Épidémiologie

Il faut préparer les omnipraticiens au bioterrorisme

En plein mois de février, des patients se succèdent à votre clinique avec les mêmes symptômes : fièvre, fatigue, maux de dos… Pas de surprise, c’est la saison de la grippe. Mais attention ! Les symptômes de la grippe s’apparentent singulièrement aux premiers signes de la variole. Certes, cette terrible maladie a été officiellement rayée de la carte en 1979. Seuls les laboratoires du Center for Disease Control, à Atlanta, et ceux de Novossibirsk, en Russie, sont censés avoir conservé des stocks du virus qu’ils gardent sous haute surveillance. Néanmoins, plusieurs gouvernements estiment que le virus existe toujours dans d'autres laboratoires et, surtout, qu’il pourrait être remis en circulation dans un acte de bioterrorisme.

Au Canada, les probabilités d’une attaque bactériologique sont faibles, mais elles ne sont pas nulles. Selon le D r Karl Weiss, microbiologiste-infectiologue à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont et professeur agrégé de clinique à l’Université, il importe de sensibiliser les omnipraticiens à cette éventualité. « Il est vrai que, dans le cas d’une attaque, les médecins généralistes n’auraient probablement pas à traiter les victimes, dit-il. Mais les omnipraticiens ont tout de même un rôle clé à jouer. Ils doivent être prêts à servir de sentinelles pour aider à dépister rapidement les actes de bioterrorisme insoupçonnés. »

Contrairement aux armes chimiques, qui agissent rapidement sur un nombre restreint d’individus, les armes biologiques sont beaucoup plus sournoises. « Dans l’attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995, 10 personnes ont été tuées et 5000 ont été blessées quasi instantanément, rappelle le D r Weiss. Avec une bactérie ou un virus, les choses se passent différemment. Entre le moment où l’individu est infecté et celui où il éprouve les premiers symptômes, il s’écoule plusieurs jours. Par exemple, l’anthrax prend de deux à trois jours pour se manifester. La variole, une dizaine de jours. »

Selon le D r Weiss, on pourrait envisager un attentat-suicide où un terroriste s’infecterait volontairement avec le virus de la variole pour ensuite aller se balader dans le métro de Montréal. Extrêmement contagieux, le virus pourrait contaminer plusieurs passagers. Ces derniers se trouveraient un peu partout dans la région métropolitaine, possiblement très loin du point d’origine de la contamination, au moment où la fièvre se ferait sentir. « Pour cette raison, les médecins de première ligne doivent être plus vigilants, souligne le microbiologiste. En effet, quand une dizaine de patients se présentent dans un endroit avec des symptômes hors du commun, il est plus aisé de constater que quelque chose ne tourne pas rond que lorsqu’on a affaire à un cas isolé. » Ainsi, les omnipraticiens doivent être attentifs aux signes cliniques qui sortent de l’ordinaire. Dans le cas de la variole par exemple, quelques jours après la fièvre, des lésions cutanées apparaissent. Ces lésions diffèrent de celles de la varicelle puisqu’elles font leur apparition d’abord sur les extrémités du corps, y compris sur la paume des mains et sur la plante des pieds. Dans le cas de la varicelle, les lésions se manifestent d’abord sur le tronc, épargnant toujours l'intérieur des mains et la plante des pieds. La phase préliminaire d’une contamination au bacille du charbon peut aussi être confondue avec la grippe. Un clinicien averti sait toutefois que la congestion nasale est rare dans le cas d’une contamination au bacille du charbon alors qu’elle est fréquente dans le cas de la grippe. Par opposition, les douleurs thoraciques sont très courantes chez les patients contaminés à l’anthrax et rares chez les personnes grippées.

 

Chercheur :

Karl Weiss

Courriel :

weisscan@aol.com

Téléphone :

(514) 252-3400, poste 4524

 

 

Sommaire
Janvier 2005


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Épidémiologie
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