Optométrie

La visière ne nuit pas à l’efficacité du hockeyeur

L’as marqueur et capitaine des Red Wings de Detroit, Steve Yzerman, a subi une égratignure de la cornée et une fracture de l'orbite de l'œil gauche lorsqu'il a été atteint par la rondelle le 1 er mai dernier. Sa vision était encore embrouillée après l’intervention chirurgicale de quatre heures qui a immédiatement suivi le match. Quelques mois plus tôt, en janvier, c’est Owen Nolan, des Maple Leafs de Toronto, qui a failli perdre l’usage d’un œil lorsqu’il a reçu un coup de bâton du défenseur Jay McKee. Pourtant, cet incident n’a pas suffi à le convaincre de mieux se protéger le visage à son retour au jeu.

Le refus de porter la visière, généralisé dans la Ligue nationale de hockey (LNH), apparaît totalement irresponsable aux yeux de deux jeunes optométristes de l’Université de Montréal, Sheila Laplante et Sophie Pilon. Au terme d’une étude sur les protecteurs oculaires les plus répandus chez les pros, elles sont catégoriques : « Il n’y a pas de différence statistiquement significative pour l’acuité visuelle, la vision des couleurs et la sensibilité au contraste avec ou sans protection oculaire », écrivent-elles dans leur rapport de recherche qui pourrait faire bientôt l’objet d’une publication scientifique. Selon les dernières données sur la question, le port de la visière est presque marginal puisque seulement 132 des 700 joueurs de la LNH portent cet accessoire. La principale raison invoquée par ceux qui ne la portent pas : la diminution de la qualité visuelle. Pour Eric Lindros, un joueur des Flyers de Philadelphie victime lui aussi d’une blessure à l’œil, porter la visière équivaut à « rouler sous la pluie sans essuie-glaces ». « Nous avons voulu savoir s’ils avaient raison de se plaindre de ce facteur, explique Sheila Laplante. Nos conclusions sont très claires : ils ont tort. » Les protecteurs qu’elles ont étudiés (les demi-visières Itech et Oklay, actuellement les plus populaires dans la Ligue) « n’influencent pas significativement la perception visuelle, disent-elles encore dans leur rapport. Il reste à établir quels sont les autres facteurs qui peuvent entraîner l’abandon du port de la visière et quel est leur véritable impact sur les performances et le confort visuel du hockeyeur. »

On se souvient qu’une controverse a éclaté l’hiver dernier quand un commentateur sportif du réseau anglais de la télévision publique, Don Cherry, a raillé les joueurs originaires du Québec et d’Europe pour leur inclination à porter la visière. Le 24 janvier, il déclarait à Hockey Night in Canada (CBC) que ceux-ci étaient des « peureux ». Selon l’étude menée à l’École d’optométrie, les joueurs qui se munissent de protecteurs faciaux devraient au contraire être encouragés, compte tenu de l’importance des blessures sportives. « Des statistiques recueillies par le Conseil canadien de la sécurité rapportent que, au cours des 25 dernières années, 34 % de toutes les lésions oculaires sont attribuables à des accidents chez les hockeyeurs, occupant ainsi le premier rang de tous les facteurs causals de blessures oculaires. Toutes ces blessures sont survenues chez des joueurs ne portant pas de visière. » Depuis 1972, plus de 298 joueurs ont perdu l’usage d’un œil, rapportent les chercheuses. Aucun de ces derniers ne portait de visière approuvée par les autorités responsables (Canadian Standard Association).

 

Chercheuses : Sheila Laplante et Sophie Pilon
Courriels : laplantes@hotmail.com ; sophie-pilon@hotmail.com
Direction : Benoit Frenette, benoit.frenette@umontreal.ca
Téléphone : (514) 343-7719

 

 


Archives | Communiqués | Pour nous joindre | Calendrier des événements
Université de Montréal, Direction des communications et du recrutement